Partons à la découverte d’une magnifique petite plante des lieux sablonneux.
Il vous faudra toutefois ouvrir l’œil pour l’apercevoir avant de marcher dessus! C’est qu’elle ne se fait pas vraiment remarquer la bougresse! Avec sa tige grêle, souvent couchée, portant de jolies fleurs certes, mais minuscules, elle est plutôt du genre à raser la terre.
Description
La Spergulaire rouge est une plante basse, souvent couchée. Ses fleurs d’une teinte lilas sont très petites. Les 5 sépales dépassent les pétales. Les feuilles sont linéaires et disposées en pseudo-verticilles autour de la tige.
La Spergulaire rouge (Spergularia rubra) est une plante basse, dont les tiges demeurent souvent couchées et ne dépassent pas 25 cm de long. Elle fleurit de mai à septembre. Ses fleurs, bien que d’un ton lilas assez soutenu, passent souvent inaperçues car elles sont très petites : 3 à 5 mm de diamètre.
En partant de l’extérieur, nous rencontrons d’abord le calice, composé de 5 sépales oblongs et plus longs que les pétales. Verts au centre, souvent brunâtres sur les bords, ils sont entourés d’une membrane assez large (une caractéristique partagée par les autres membres du genre Spergularia).
Les 5 pétales ont une teinte lilas, très pâle au centre de la fleur et de plus en plus vive lorsqu’on se rapproche de leur extrémité.
Ils entourent les organes reproducteurs : généralement 10 étamines (parfois moins : de 5 à 10) et un pistil (l’organe femelle) composé de 3 styles partant de l’ovaire. Ci-dessous, on voit que l’ovaire (qui donnera le fruit après la fécondation) est supère, c’est-à-dire qu’il est situé au-dessus du point d’insertion des étamines et des pièces florales (pétales et sépales).
Les feuilles sont glabres et linéaires. Elles sont disposées en cercles autour de la tige et sont mucronées (elles sont terminées par une petite pointe dure et raide).
Aux points d’insertion des feuilles sur la tige se trouvent des stipules. Ces petites feuilles en format réduit sont chez la Spergulaire rouge membraneuses et de couleur argentée.
Les botanistes aiment bien couper les feuilles en quatre!
Ils nous disent que les feuilles de la Spergulaire rouge ne sont pas vraiment placées en cercles. En réalité, elles sont opposées deux par deux. Vous ne le croyez pas? La Gazette le prouve!
Voici une première paire de feuilles opposées (1a) partant de la tige principale. Elles sont accompagnées de leurs stipules (1b).
(N’oubliez pas que vous pouvez agrandir les photos en cliquant dessus)
Du point d’insertion de ces feuilles part une tigette portant une autre paire de feuilles opposées (2a) ainsi que leurs stipules (2b).
On continue : du point d’insertion de la deuxième paire de feuilles part à nouveau une tigette portant une troisième paire de feuilles opposées (3a) ainsi que leurs stipules (3b).
Comme les tigettes sont très courtes, les feuilles semblent être placées en verticille autour de la tige. On parle dans ce cas d’un pseudo-verticille.
Habitat
La Spergulaire rouge aime la lumière et les sols secs, acides et pauvres en nutriments.
On la trouvera donc dans des milieux ouverts sur sol acide comme les landes, les chemins forestiers dans des bois sablonneux et certaines friches.
Dans la classification des biotopes EUNIS (European Nature Information System), la Spergulaire rouge est liée aux « pelouses mésophiles piétinées à espèces annuelles » (E2.8) 1
Voici deux exemples typiques de milieux ouverts dans lesquels croît la Spergulaire rouge.
Ci-contre, la lande de Kalmthout, au nord de la Belgique, près de la frontière néerlandaise.
Ci-dessous, un chemin sablonneux assez large et bien éclairé dans le bois de Rixensart, au sud-est de Bruxelles.
Sa prédilection pour les terrains sablonneux explique son surnom régional de Sabline rouge.
Comme d’autres espèces basses, la Spergulaire rouge supporte bien le piétinement.
Ne montant jamais très haut, elle ne pourrait résister à la concurrence des plantes plus grandes. Pour accéder à la lumière et donc vivre, elle s’établit dans des endroits où la compétition est moindre, là où les plantes élevées ne survivent pas à cause du piétinement.
En Belgique, la Spergulaire rouge est assez commune au nord du pays, dans les landes de Campine et les terrains sablonneux de Flandre et du Brabant. Elle est plus rare au sud : elle y est surtout localisée dans les fagnes de l’Ardenne.
Voisins et voisines
Dans les milieux qu’elle affectionne, la Spergulaire rouge a souvent comme compagnes la Petite oseille, la Renouée des oiseaux et la Véronique à feuilles de serpolet.
La Petite oseille (Rumex acetosella) a la même écologie que la Spergulaire rouge. Elle pousse sur les sols ensoleillés, secs et acides, souvent sablonneux. Elle est un peu plus grande (40 cm) et se reconnaît à ses fleurs rouges réunies en longues grappes au sommet des tiges, de mai à août.
Les feuilles sont elliptiques et hastées, c’est-à-dire qu’elles sont munies de 2 lobes pointus et écartés à la base (photo ci-contre).
La Petite oseille et la Spergulaire rouge sont des espèces caractéristiques d’une communauté végétale que les phytosociologues appellent du doux nom de Rumici acetosellae – Spergularietum rubrae 2.
Une autre plante observée fréquemment dans cette communauté est la Renouée des Oiseaux (Polygonum aviculare), qui appartient à la même famille que la Petite oseille, celle des Polygonacées.
Elle affectionne les endroits secs et piétinés, tout comme la Spergulaire rouge. Souvent couchée sur le sol, elle mérite bien son surnom de « traînasse » (voir photo ci-dessous).
Mais contrairement à notre Spergulaire, elle apprécie les sols enrichis en azote. Pour cette raison, elle est bien plus courante dans les milieux anthropisés, c’est-à-dire modifiés par la présence humaine. C’est même l’une des plantes sauvages les plus communes de nos régions, colonisant fréquemment les trottoirs des villes.
La Véronique à feuilles de serpolet (Veronica serpyllifolia) est également une plante basse et rampante, poussant sur des sols piétinés. Elle accompagne la Spergulaire rouge lorsque le sol n’est pas trop acide.
Ses fleurs, que l’on peut admirer d’avril à octobre, sont petites (environ 5 mm de diamètre) et se composent de quatre pétales blanchâtres striés de bleu violacé. Le pétale supérieur est plus grand que les latéraux, le pétale inférieur est plus étroit. Ses feuilles sont opposées.
Signalons qu’une autre plante voisine parfois la Spergulaire rouge : le Gnaphale des marais (Gnaphalium uliginosum), une Astéracée (famille du Pissenlit) qui aime les terrains acides mais demande toutefois un sol humide, au moins temporairement. C’est une plante assez courante, que l’on piétine allègrement sans la voir car ses capitules brunâtres ne sont pas apparents (3 à 4 mm).
Usage médicinal
Bien que peu connue dans nos régions comme plante médicinale, la Spergulaire rouge est utilisée en infusion dans plusieurs parties du monde, notamment au Maghreb.
Elle est réputée comme étant efficace dans la dissolution des calculs rénaux et le traitement des infections urinaires comme la cystite ou les coliques néphrétiques. En réduisant l’acide urique, elle serait bénéfique dans les crises de goutte et des rhumatismes .
Autrefois on la réduisait en poudre et on la mélangeait à de l’huile d’olive. La mixture ainsi obtenue était ensuite étalée sur le visage pour faire disparaître les taches de rousseur 3 5.
Malgré cela, sa composition chimique n’est pas encore bien connue. Un étude récente a découvert dans cette plante 36 composés phénoliques. Les résultats laissent supposer qu’elle pourrait être intéressante pour la santé humaine en supprimant l’hyperglycémie ou en luttant contre les radicaux libres, impliqués dans le vieillissement 4.
Classification
La Spergulaire rouge fait partie de la famille des Caryophyllacées, une grande famille de plantes herbacées.
Les Caryophyllacées sont caractérisées par des feuilles opposées (qui peuvent parfois donner l’impression d’être verticillées comme chez la Spergulaire rouge). Les tiges sont souvent renflées aux nœuds.
Les fleurs sont généralement de type 5 : 5 pétales et 5 sépales, 10 étamines. C’est le cas chez la Spergulaire rouge.
Superbe balade fleurie agrémentée de commentaires scientifiques précis et avec humour, merci. Thérèse
J’aimeJ’aime
Super, très intéressant et très plaisant. Je me réjouis de la suite..😜
J’aimeJ’aime
Merci de toutes ces infos très interessantes…
J’aimeJ’aime