Depuis 150 ans, les scientifiques pensaient que les lichens étaient des associations symbiotiques entre une algue et un champignon. Une étude récente a découvert qu’un troisième larron est présent dans ce ménage : de la levure!

Souvenez-vous : il y a quelques mois la Gazette des Plantes avait été faire un tour dans la réserve naturelle de Sclaigneaux et en avait ramené un billet sur un beau lichen dénommé Cladonia portentosa. Nous vous expliquions par la même occasion ce qu’était un lichen.

Cladonia portentosa

Un lichen n’est pas une plante à fleurs, ce n’est pas non plus une mousse avec laquelle on le confond souvent. En réalité, ce n’est pas un être vivant, mais deux! C’est un mariage. Aline Algue savait bien cuisiner, mais son logement n’était pas confortable. Gaston Champignon possédait une belle maison, mais ne savait pas préparer de bons petits plats. Ils se sont rencontrés, se sont plus et se sont mariés.
Un lichen, c’est en fait une association, une symbiose entre un champignon et une algue.

L’association est indispensable au champignon, mais ne l’est généralement pas pour l’algue qui peut exister sans lui (elle revêt dans ce cas une forme complètement différente).
L’algue fournit au champignon les molécules organiques qu’elle fabrique par photosynthèse, et le champignon lui rend en retour des matières azotées qu’il fabrique plus rapidement qu’elle. Surtout, en retenant l’eau dans ses tissus, il protège l’algue du dessèchement.

Rassurez-vous : ce que nous écrivions à l’époque n’est pas erroné, mais seulement incomplet. Des chercheurs de l’Université du Montana viennent en effet de découvrir un troisième partenaire dans les lichens  : des levures, donc également des champignons, mais unicellulaires.
On connaît bien le rôle que jouent certaines levures dans la fermentation du pain ou celle de la bière.  D’autres levures nous sont moins sympathiques : par exemple celles du genre Candida qui sont responsables des mycoses.

Xanthoria parietina est l’un des lichens les plus répandus

Les levures qui ont été trouvées dans les lichens étaient totalement inconnues jusqu’à présent. Leur rôle dans cette symbiose serait vraisemblablement de fabriquer des substances chimiques permettant de repousser des attaques de prédateurs.

Comme le montre le schéma ci-dessous, elles sont situées dans le cortex, la surface externe du lichen, une zone dans laquelle les filaments du champignon sont densément entremêlés et font office de barrière vis-à-vis du monde extérieur. Les algues sont elles situées juste en-dessous du cortex. N’oublions pas qu’elles doivent recevoir assez de lumière pour pouvoir réaliser la photosynthèse.

Schéma d’un lichen

Cette découverte permet enfin de comprendre pourquoi des lichens complètement différents sont pourtant composés de la même algue et du même champignon.

Rappelons que les champignons ne sont pas des plantes!
Bien qu’il n’y ait plus actuellement aucune classification du vivant qui soit acceptée par tous les biologistes (les découvertes récentes ayant bouleversé les anciennes hiérarchies), la classification « classique » est encore souvent utilisée par commodité. Cette classification distinguait les animaux, les plantes, les champignons, les bactéries et deux autres règnes (protistes et archées).
Les algues que l’on trouve dans les lichens sont en général des algues vertes (appartenant au règne végétal), mais dans 10 à 15% des cas, ce sont des algues bleues qui sont en réalité des bactéries (des cyanobactéries pour être précis).

Sources :
– Purdue University, Yeast emerges as hidden third partner in lichen symbiosis, ScienceDaily, 21 July 2016.
– Alice Maestracci; Le ménage à trois des lichens; Pour la Science; 10/8/2016