Les premières plantes terrestres seraient apparues il y a 500 millions d’années (première partie)

Selon une nouvelle étude, les premières plantes qui ont colonisé la terre ferme seraient nées il y a environ 500 millions d’années.
Plus tôt certes que l’âge des premiers fossiles découverts jusqu’à présent, mais les informations parues dans certaines revues sont un peu trop sensationnalistes. Faisons donc le point de la question.


Prologue

Pourquoi diantre essayer de dater précisément l’origine des plantes terrestres ?
Il faut savoir que la colonisation de la terre ferme par les végétaux est l’un des épisodes les plus importants dans l’histoire de notre planète. Leur apparition s’est traduite par une augmentation importante de l’oxygène atmosphérique et une baisse substantielle du CO2. Elle a été à l’origine de la formation des sols, et a donc créé de nouveaux habitats pour les animaux et les champignons.

Bonjour, je suis Anémone, la nouvelle journaliste de la Gazette des Plantes. Je vais vous dire quelques mots sur …


Les conséquences de l’apparition des plantes terrestres

Les plantes pratiquent la photosynthèse pour produire leurs propres matières organiques. Pour ce faire, elles utilisent l’énergie du soleil, extraient du CO2 de l’atmosphère et y rejettent de l’oxygène.

Le graphique ci-dessous 4 montre que la concentration de l’oxygène dans l’atmosphère a  augmenté une première fois (de 3 à 12 %) aux environs de – 600 Ma environ (les dates sont approximatives) : les cyanobactéries, premiers organismes capables de photosynthèse, ont saturé les océans en oxygène , et celui-ci s’échappe dorénavant dans l’atmosphère.

Une deuxième augmentation débute à partir de ± -500 Ma. Celle-ci est due à l’apparition des premières plantes terrestres qui enrichissent l’atmosphère en oxygène.

Evolution de la concentration en oxygène dans l’atmosphère au cours du dernier milliard d’années. La ligne en pointillé rouge indique la concentration actuelle (21 %) – via Wikimedia Commons


La formation des sols

Avant la sortie des plantes de l’eau, il n’y avait pas de  terre, rien que du minéral :  des roches nues et les grains (sable, limon…) résultant de leur fragmentation.

Les premières plantes émergèrent, moururent et se décomposèrent : litières et humus apparurent, créant de nouveaux milieux propices au développement d’autres végétaux, de  champignons et d’animaux.


Revue de presse


Selon une nouvelle étude, les plantes terrestres seraient apparues il y a 500 millions d’années.
C’est plus tôt que l’âge des premiers fossiles découverts jusqu’à présent (-475 Ma), mais la différence est cependant moindre que ce qui a été annoncé dans certaines revues. 


« Un événement marquant dans l’histoire de la Terre – l’apparition des plantes sur la terre ferme – pourrait s’être produit 100 millions d’années plus tôt qu’on ne le pensait » (Origins of land plants pushed back in time; BBC News).

« L’apparition des premiers végétaux terrestres pourrait être reculée de presque 100 millions d’années selon un groupe de chercheurs » (Les premières plantes seraient plus vieilles que prévu; Futura-Sciences) .

Ce sont quelques exemples de titres d’articles récents qui commentent les résultats de cette étude.  Avant de parler de celle-ci, il est bon de remettre les pendules à l’heure (c’est le cas de le dire). En effet, selon ces articles, les premières plantes terrestres connues actuellement datent d’environ 420 millions d’années. Découvrons pourquoi ce n’est pas exact.

Les plantes sont partout, mais quand ont-elles conquis la terre ferme ?


Les premières traces de plantes terrestres découvertes jusqu’à présent


Les plus anciennes traces de plantes terrestres datent d’il y a 475 millions d’années. Il s’agit de spores fossilisées, trouvées à Oman et en Argentine 12Les recherches sur les parois de ces spores indiquent une relation avec les Hépatiques, un groupe de plantes ressemblant aux mousses.


Les Hépatiques 

Les Hépatiques (nom scientifique : Marchantiophyta) ressemblent à des algues ou bien des mousses (Bryophytes), mais alors des mousses aplaties.

Elles ont reçu le nom d’Hépatiques à cause de la similitude de leur forme avec un foie. Les Anglophones les appellent d’ailleurs liverworts (de liver : foie et wort : herbe).
Du fait de cette ressemblance, nos ancêtres pensaient qu’elles pouvaient servir de remède dans les affections du foie.

Une Hépatique actuelle (Radula complanata)

Certaines de leurs caractéristiques semblent prouver qu’elles sont apparues avant les mousses dans l’évolution. 

Les Hépatiques, tout comme les mousses , n’ont pas de vraies racines, mais des rhizoïdes : ce sont des filaments qui les ancrent au substrat mais qui n’absorbent pas les éléments nutritifs du sol, comme le font les racines des fougères ou des plantes à fleurs.
Chez les Hépatiques les rhizoïdes sont unicellulaires alors qu’ils sont multicellulaires chez les mousses.

Une autre différence concerne les échanges gazeux (CO2)  entre l’atmosphère et la plante, indispensables pour pratiquer la photosynthèse.
Chez les Hépatiques, ces échanges se font par des ouvertures fixes (des pores). Les Bryophytes par contre possèdent des stomates, des ouvertures qui peuvent se fermer et s’ouvrir afin de réguler le flux.


Nous avons vu que les premières traces des plantes terrestres remontent à ± 475 Ma. Pourquoi diable les articles que nous avons cités ci-dessus mentionnent-ils alors le chiffre de 420 Ma?

Ces articles se réfèrent en réalité aux fossiles de Cooksonia, trouvés en Irlande et qui ont ± 425 millions d’années Or les Cooksonia ne sont pas les plus anciens vestiges de plantes terrestres connus, mais bien les plus anciennes plantes terrestres possédant des tiges munies de vaisseaux conducteurs de sève! Pour être plus précis : seuls certains fossiles de Cooksonia présentent une bande noire au centre de leur tige, qui est interprétée comme un reste de vaisseaux conducteurs 3.

Les Hépatiques et les mousses n’ont pas de tels vaisseaux. Chez ces organismes plus anciens, l’eau et les éléments nutritifs circulent dans la plante en passant d’une cellule à l’autre.

Des vaisseaux conducteurs permettent de transporter l’eau sur de plus grandes distances : les plantes peuvent donc atteindre de plus grandes tailles et vivre dans des endroits plus secs.

Reconstruction de Cooksonia pertoni (© By Smith609 via Wikimedia Commons). Au sommet de leurs tiges se trouvaient des soucoupes contenant les spores qui permettaient à la plante de se reproduire.

Les Cooksonia constituent donc une forme de transition entre les Bryophytes non-vasculaires et les plantes vasculaires telles que les Lycopodes, les prêles, les fougères, les conifères et les Angiospermes.

Résumons cette première partie en reprenant notre schéma de l’évolution des plantes terrestres (= les Embryophytes) et plaçons-y les Cooksonia ainsi que les premières traces de spores fossilisées.

Cliquez sur le schéma pour l’agrandir

Nous devons encore ajouter sur ce schéma les toutes premières plantes terrestres. Cela sera pour le prochain numéro!



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Sources :

1 : Wellman, Charles H. et al.; Fragments of the earliest land plants; Nature; volume 425, pages 282–285; Septembre 2003
2 : Rubinstein, C.V. et al.; Early Middle Ordovician evidence for land plants in Argentina (eastern Gondwana); New Phytologist; 188 (2): 365–369; Août 2010
3 : Wikipedia; Cooksonia; Décembre 2017
4 : Wikipedia; Atmosphere of Earth; Février 2018

 

A propos La gazette des plantes

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2 commentaires pour Les premières plantes terrestres seraient apparues il y a 500 millions d’années (première partie)

  1. christian dit :

    Bonjour,
    Mon commentaire ne concerne pas les premières plantes ,mais l’oxygénation de l’atmosphère.
    On parle des cyanobactéries ,mais des travaux récent verraient un relargage interne , de nature géologique, de l’oxygène.Qu’en est-il vraiment?
    Il faut encore attendre un peu pour d’autres éléments accréditant ,l’une ou l’autre origine.

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    • Bonjour Christian

      Notre atmosphère est riche en oxygène (21%) et ce fait est remarquable, car au commencement elle en était dépourvue. Il est quasiment acquis que ce sont les organismes vivants qui ont changé cela. Mais la composition actuelle est en effet le résultat d’une danse complexe impliquant des causes géologiques et des causes biologiques. On ne peut répondre à cette question fondamentale en quelques lignes, elle mérite la rédaction d’un dossier complet. Et puisque les plantes y ont joué un rôle important, la Gazette va s’y atteler!

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