Dossier : La germination d’une graine d’Orchidée, une entreprise délicate

Ce billet sert d’introduction à une série d’articles que nous consacrerons à la Listère ovale, une Orchidée relativement commune dans nos régions.
Il semble logique de commencer par le commencement : la germination d’une graine d’Orchidée. Vous le verrez : c’est une entreprise délicate.


Eh oui, cela étonne souvent le grand public mais pas mal d’Orchidées sauvages poussent dans nos régions! 45 espèces ont été observées en Belgique depuis 2008.

Sans doute sont-elles moins spectaculaires que les Orchidées vendues dans les jardineries et qui se retrouvent ensuite sur les tablettes de fenêtre. Elles sont néanmoins passionnantes à étudier.

Une prairie (non amendée) où poussent une multitude d’Orchis bouffon (Anacamptis morio)

Beaucoup d’espèces différentes donc, mais la plupart sont rares ou en régression, comme l’Orchis bouffon (Anacamptis morio) représenté ci-dessus. Certaines sont même en danger de disparition. La faute à l’homme bien sûr, qui détruit leur habitat naturel (en général pauvre en nutriment). Les apports d’engrais entraînent très vite leur disparition. N’oublions pas également les « collectionneurs » qui les cueillent pour les transplanter dans leur jardin.


La germination d’une graine d’Orchidée : une entreprise délicate

Les graines des Orchidées sont minuscules. Par exemple, celles de l’Orchis bouffon mesurent environ 0.56 mm de long et 0.18 mm de large 1 !
Etant si petites, elles sont quasiment dépourvues de réserves nutritives. Elles ne peuvent donc grandir seules et ont par conséquent besoin pour survivre de s’associer avec un ou plusieurs champignons spécifiques, au moins durant la période de germination.

Un transfert de carbone a lieu du champignon vers la jeune Orchidée. Celle-ci est donc « mycohétérotrophe« , ce qui signifie simplement qu’elle est dépendante d’un champignon pour se nourrir (du grec mykes « champignon », heteros  « autre, différent » et trophe  « nutrition »). La structure formée par la graine qui germe et le ou les  champignon(s) est appelée protocorme.

La probabilité qu’une graine rencontre le champignon adéquat est très petite. Vous ne serez donc pas étonné d’apprendre qu’un plant produit plusieurs milliers de graines, voire plusieurs dizaines de milliers, pour pallier ces problèmes et assurer la survie de l’espèce. Malgré cela les Orchidées adultes restent rares.

On estime qu’un plant d’Orchis de Fuchs (Dactylhoriza fuchsii) peut produire entre 55.000 et 185.000 graines 3

Vous vous demandez peut-être quel est l’avantage pour le champignon de s’associer avec une graine n’ayant aucune réserve et ne pratiquant pas encore la photosynthèse? On n’a pas encore de réponse certaine à cette question. Il semble que cette interaction entre une graine d’Orchidée et un champignon soit plutôt un transfert unilatéral de nutriments qu’un échange mutuel 2.

Il n’y aurait pas de bénéfice pour le champignon. Les jeunes Orchidées seraient par conséquent des parasites de leurs partenaires fongiques. La façon dont les Orchidées parviendraient à piéger les champignons pour former l’interaction demeure mystérieuse.

L’Orchis pyramidal (Anacamptis pyramidalis) ; une belle plante dans une peau de vache ?

N’oubliez pas que les champignons ne produisent pas eux-mêmes leur matière organique : ils la trouvent en parasitant des organismes vivants, ou bien en la prélevant sur des organismes morts ou en s’associant à d’autres plantes lors de symbioses appelées mycorhizes. Si nous résumons la situation, nous pouvons donc dire que les jeunes Orchidées parasitent donc souvent, de manière indirecte, d’autres plantes!


Des Orchidées communes…

Certaines espèces d’Orchidées sont malgré tout communes chez nous. C’est le cas de l’Épipactis à larges feuilles (Epipactis helleborine), que l’on croise fréquemment dans les bois, les parcs et les jardins.

L’Epipactis à larges feuilles

Une autre Orchidée courante est la Listère ovale (Neottia ovata). Elle passe inaperçue la plupart du temps car elle n’est pas très spectaculaire, comme le montre la photo suivante.

La Listère ovale (Neottia ovata)

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Sources :

1 : Joseph Arditti et Ghani AKA; Numerical and physical properties of orchid seeds and their biological implications; New Phytologist; 145, p. 385; Janvier 2000
2 : Hanne N. Rasmussen & Finn N. Rasmussen; Orchid mycorrhiza: implications of a mycophagous life style; Oikos; 6 mars 2009
3 : Joseph Arditti et Ghani AKA; Numerical and physical properties of orchid seeds and their biological implications; New Phytologist; 145, p. 385; Janvier 2000

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