Le cerfeuil sauvage (Anthriscus sylvestris)

Le cerfeuil sauvage (ou anthrisque sauvage) est l’une des ombellifères les plus fréquentes près des habitations. Mais les ombellifères se ressemblent beaucoup, et nous verrons les caractères qui permettent de distinguer le cerfeuil sauvage du cerfeuil penché, de la petite ciguë, ou encore de la berce du Caucase.


  • Classification

Angiospermes > Dicotylédones vraies > Apiacées > Anthrisques

Le cerfeuil sauvage fait partie de la grande famille des apiacées qui se caractérisent par leurs fleurs groupées en ombelles. Anciennement on les appelaient d’ailleurs ombellifères. Cette famille comprend beaucoup de plantes qui accompagnent nos repas : la carotte, le céleri, le persil, le fenouil, la coriandre, l’aneth etc… Mais aussi la petite et la grande ciguë!

Le cerfeuil sauvage fait partie des ombellifères

Le cerfeuil sauvage (Anthriscus sylvestris) est un proche parent du cerfeuil commun (Anthriscus cerefolium), le cerfeuil employé en cuisine. Tous deux appartiennent au genre Anthriscus.


  • Habitat

Son nom latin est Anthriscus sylvestris, l’anthrisque des bois donc. Et vous pourrez en effet le trouver dans les bois clairs, ou au bord des rivières. Mais il est bien plus probable que vous le découvriez  pas loin des habitations : au bord des chemins, dans les terrains vagues, sur les talus etc…

Une colonie de cerfeuils sauvages au bord d’un talus

C’est probablement l’une des ombellifères que l’on voit le plus fréquemment dans nos villes en mai et en juin. Cette plante vivace se plaît en effet sur les sols plutôt frais et riches en azote. Sa présence en grandes colonies témoigne donc d’un sol enrichi par les nitrates qui proviennent généralement des activités humaines (engrais, dépotoirs, excréments d’animaux domestiques etc.).

Flore de Bruxelles_Cerfeuil

Répartition du cerfeuil sauvage dans la région de Bruxelles. Source : The flora of Brussels (2003-2005)

Regardez par exemple sa distribution à Bruxelles : à l’exception du centre très urbanisé de la ville, et de la forêt de Soignes au sud, il est implanté un peu partout.

Source : The flora of Brussels (2003-2005)

  • Description

Les fleurs :

C’est une ombellifère : ses fleurs sont donc regroupées en ombelles. Ce sont même des ombelles doubles! Au niveau principal, de 7 à 16 rayons partent du même point de la tige (voir la flèche blanche sur la photo ci-dessous). Ces rayons primaires composent l’ombelle principale.

Le nombre de rayons est l’une des caractéristiques qui permet de faire la différence entre le cerfeuil sauvage et la berce commune (Heracleum sphondylium : de 15 à 30 rayons) et la berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum : plus de 50 rayons).

Ombelle principale : 7 à 16 rayons partent d’un même point sur la tige

Remarquez qu’il n’y a pas de bractées au niveau de l’ombelle principale (les bractées sont les petites feuilles qui entourent généralement une fleur). C’est un autre critère qui permet de distinguer certaines espèces d’ombellifères.


Chaque rayon primaire se subdivise ensuite en 8 à 12 rayons secondaires, qui portent les fleurs proprement dites. C’est l’ombelle secondaire ou ombellule.

Ombelle secondaire

L’ombelle secondaire est entourée de petites bractées pas très apparentes (voir la flèche blanche sur la photo ci-dessus).

Cela permet de distinguer le cerfeuil sauvage de la petite ciguë (Aethusa cynapium) dont les bractées sont plus longues et bien visibles (voir une photo de petite ciguë sur le site de la K.U.L).


Les fleurs sont petites, et possèdent 5 pétales blancs, 5 étamines (organes mâles qui produisent le pollen) et au centre, le pistil (organe femelle) est formé de deux carpelles soudés qui abritent les ovules. 

Fleurs à 5 pétales blancs

La floraison débute en avril et se termine au début du mois de juin. C’est l’une des ombellifères les plus précoces.

En comparaison, le cerfeuil penché (Chaerophyllum temulum) fleurit de mai à août, la petite ciguë (Aethusa cynapium) de juin à octobre, la berce commune (Heracleum sphondylium) de juin à septembre, et la berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum) entre juin et septembre également.


On remarque au sein de chaque ombelle secondaire une nette différenciation des fleurs

On remarque au sein de chaque ombelle secondaire (ombellule) une nette différenciation des fleurs. Celles situées à la périphérie de l’ombellule possèdent 3 pétales externes bien plus grands que les deux autres.
Pour un insecte butineur arrivant par en haut, chaque ombellule revêt alors l’aspect d’une  seule grande fleur!


Pour en terminer avec les fleurs du cerfeuil sauvage, signalons qu’elles seraient fréquemment ajoutées aux salades, comme celles du cerfeuil commun.

Source : Cuisine sauvage

Les feuilles :

Elles sont composées : elles sont formées de 3 folioles de forme triangulaire, elles-mêmes subdivisées en segments séparés. Elles sont alors dites bipennatiséquées. Mais ces segments peuvent également être eux-mêmes divisés; la feuille est dans ce cas tripennatiséquée.

Feuille de cerfeuil sauvage

Les feuilles ont une odeur forte, désagréable lorsqu’on les froisse et sont surtout utilisées comme répulsif contre les moustiques.

Crues, les feuilles seraient toxiques selon certains auteurs ou certains sites. Cela expliquerait son surnom de ciguë blanche dans certaines régions.
Par contre, selon François Couplan, grand spécialiste des utilisations traditionnelles des plantes sauvages comestibles, on peut consommer ses jeunes feuilles cuites comme légumes.

Jeunes feuilles de cerfeuil sauvage

Et Jean-Marie Dumaine, un pionnier de l’utilisation des plantes sauvages dans la cuisine, affirme que les feuilles et les fleurs peuvent être utilisées comme celles du cerfeuil commun. Elles seraient très bonnes dans du fromage frais.

C’est également l’avis du très sérieux site finlandais NatureGate qui précise que « ses feuilles sont comestibles et peuvent être ajoutées dans des soupes ». Elles ont une saveur douce.

Dans le doute, mieux vaut s’abstenir! D’autant plus que le risque de confusion avec la petite ciguë est réel pour un non-spécialiste.

Quelques sources : 
– Couplan François, Le régal végétal, Sang de la Terre, Paris 2015
– Sauvages de ma rue, Muséum national d’Histoire naturelle et Lepassage, Paris 2012
– Le conseil de Jean-Marie Dumaine sur le cerfeuil sauvage
– Cuisine sauvage
– L’éco-tourisme en Gironde : page sur le cerfeuil sauvage
– NatureGate : page sur le cerfeuil sauvage
– Plantes sauvages comestibles (site des Ateliers d’écologie pratique)
– Jardin ! L’encyclopédie : page sur le cerfeuil sauvage

La tige :

Elle est cannelée. Poilue dans le bas, et plutôt glabre vers le haut. Sa hauteur varie entre 50 et 150 cm.

Tige glabre vers le haut

Tige poilue vers le bas

Elle est cannelée. Poilue dans le bas, et plutôt glabre vers le haut. Elle est cannelée. Poilue dans le bas, et plutôt glabre vers le haut. Elle est cannelée. Poilue dans le bas, et plutôt glabre vers le haut. Elle est cannelée. Poilue dans le bas, et plutôt glabre vers le haut. Sa hauteur varie entre 50 et 150 cm.

La tige est creuse.
La tige est creuse.
Ce critère permet de distinguer le cerfeuil sauvage du cerfeuil penché (Chaerophyllum temulum), dont la tige est pleine.

Attention cependant : le cerfeuil sauvage n’est pas  la seule ombellifère à posséder une tige creuse! C’est aussi le cas de la petite ciguë (Aethusa cynapium).

Tiges du cerfeuil sauvage et du cerfeuil penché


Prudence : il vaut mieux mettre des gants, des lunettes et protéger ses bras avant de couper une tige d’ombellifère. En effet,  si jamais vous vous méprenez et vous vous attaquez à une tige de berce du Caucase (Heracleum mantegazzianum), également très présente chez nous, vous risquez de très graves brûlures après exposition de la zone au soleil.

Flore de Bruxelles_berce du Caucase

Répartition de la berce du Caucase dans la région de Bruxelles. Source : The flora of Brussels (2003-2005)

Heureusement, la berce du Caucase a une taille nettement plus impressionnante : de 2 à 5 m de haut, et ses ombelles principales ont plus de 50 rayons.

Consultez ces deux sites pour obtenir plus d’informations sur la berce du Caucase : – ce site de la région wallonne
le site de la Fondation des Brûlés

En fait, la plupart des ombellifères possèdent un latex irritant et photosensibilisant (causant des brûlures lors d’une exposition au soleil). Mais le danger des ombellifères indigènes est nettement moins grand.

Source : BERTRAND Bernard, L’herbier toxique, Plume de Carotte, Toulouse, 2014

Les nœuds (l’endroit de la tige où se forme un bourgeon et d’où partent les ramifications) sont légèrement renflés.

Noeud sur une tige de cerfeuil sauvage


Les fruits :

Les fruits apparaissent dès le début du mois de juin, à la fin de la floraison.
Ce sont des fruits secs, appelés diakènes, caractéristiques des Ombellifères. Diakènes car ils sont en effet composés de deux parties émanant de la transformation après la fécondation de deux carpelles soudés (un carpelle est constitué de bas en haut par l’ovaire, le style et le stigmate; l’ensemble des carpelles forme le pistil, l’organe femelle).

Ils sont allongés (5 à 10 mm de long), de forme cylindrique et possèdent une surface lisse. Les jeunes fruits ont un goût agréable, ils sont légèrement aromatiques et sont utilisés comme condiment.

Sources :
– Cuisine sauvage : fiche sur le cerfeuil sauvage
– Couplan François, Le régal végétal, Sang de la Terre, Paris 2015

  • Toxicité :

Nous avons déjà mentionné les fleurs et les feuilles (voir ci-dessus). Ce qui est certain, c’est que la racine est extrêmement toxique, car elle contient un composé qui empêche la division cellulaire.



  • Etymologie

– Cerfeuil vient du latin caerefolium qui désignait la plante cultivée. Caerefolium tire son origine du grec : la première partie dériverait soit de chairo, se réjouir, soit de cheir, main. La seconde partie  vient de phyllon, feuille.

– Anthrisque vient du grec ancien anthryskon qui désignait notre cerfeuil sauvage. Anthos signifiait fleur, et rhyskon la haie. C’était donc la fleur des haies.

Sources :
– COUPLAN François, Les plantes et leurs noms, Editions QUAE, Versailles, 2012
Jardin ! L’encyclopédie 

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La gazette des plantes, un blog qui part à la découverte des végétaux qui nous entourent en Belgique
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19 commentaires pour Le cerfeuil sauvage (Anthriscus sylvestris)

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  3. ISABELLE dit :

    Près de mon habitation pousse à profusion une plante qui ressemble en tous points à votre description du cerfeuil sauvage, sauf….que ses tiges sont rougeâtres, bien foncées….De plus l’odeur des feuilles froissées est vraiment légère .Pouvez-vous m’éclairer pour une identification exacte? Merci

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  4. Alain dit :

    Même observation qu’ Isabelle, je précise que la tige est rougeâtre uniquement aux « noeuds ».
    En tous cas il ne s’agit pas de cerfeuil penché.

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  5. yves70 dit :

    Bonjour, je découvre le site et je vous dis BRAVO. Excellent site, des articles super intéressants, j’espère que vous allez continuer à en publier régulièrement !!! Ornithologue amateur, je me suis tout doucement passionné, au fil de mes sorties ornithos sur le terrain, par la botanique et j’apprends tout en auto-didacte donc je recherche toutes les sources d’infos, comme ce site, qui peuvent m’aider dans mon apprentissage.J’habite Grez-Doiceau. J’aimerais faire des sorties botaniques dans la région. En connaissez-vous ?

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    • Merci pour vos encouragements. En ce qui concerne les sorties botaniques dans votre région, vous pouvez consulter le site des Cercle des Guides-Nature du Brabant : https://guidenaturebrabant.wordpress.com/accueil/agenda-complet/
      Une autre possibilité serait de suivre la formation botanique de Natagora : https://www.natagora.be/formation-la-botanique.
      Durant cette formation vous pourrez participer à des TP et entrer en contact avec des botanistes compétents. C’est probablement le meilleur moyen de rencontrer des gens partageant votre passion et votre région !
      Comme outils complémentaires, utiles à un apprentissage en autodidacte, il y a bien sûr la Flore de Belgique (la « Flore bleue ») ou la nouvelle Flore Ecologique de Belgique, et Plantnet pour l’aide à l’identification sur la base de photos. Plantnet est devenu nettement plus fiable qu’auparavant (https://identify.plantnet.org/), mais cela ne suffit pas pour des genres difficiles. Et puis il y a bien sûr Observations.be pour la validation.

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  6. Georges dit :

    Merci pour cette description très détaillée.
    Un point me manque: le tubercule est-il comestible comme pour le cerfeuil tubéreux?

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  7. Edi dit :

    Et l’anthrisque caucalis? Elle aurait aussi des tiges rouge.violette…

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  8. Oui, Anthriscus caucalis a souvent des tiges rougeâtres. Et c’est une espèce qui se répand de plus en plus.

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  9. Massé Susan dit :

    super description plus photos … ce qui m’a permis d’éliminer cette plante comme possibilité … juste pour vous encourager!

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  10. Boutin dit :

    Bonjours ! Je cherche le nom d’une plante qui ressemble au cerfeuil des bois. Les petits ensembles de fleurs blanches forment une demi-sphère parfaite. Les ombelles sont constituées d’un grand nombre de tiges si parfaitement cannelées qu’elle me font penser à un travail d’usineur.

    Tiges parfaitement vertes et les plantes nombreuses forment des jolis buissons d’un bon mètre cinquante de haut, voir plus. Proche de la mer et près d’une petite rivière à l’eau limpide.

    C’est cette demi-sphère qui me semble typique ! Ne passez pas des heures à chercher, mais si la réponse vous semble évidente faites le moi savoir. Je les ai remarqué à Fishbourne, sud de l’Angleterre, parfaitement en fleur au premier juin de cette année comme nous n’en avons plus eu depuis 1982.

    Bonne Journée !

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    • Gwenaël dit :

      Bonjour,
      Sans image pour illustrer les caractères diagnostiques, il est impossible de prétendre à une identification fiable et définitive.
      Néanmoins votre description m’a immédiatement évoqué (morphologie, milieu, région géographique) l’oenanthe safranée (Oenanthe crocata).
      Notez qu’il s’agit d’une espèce notoirement toxique !

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  11. Merci pour votre description concernant le cerfeuil sauvage. Je parcours les dunes de De Panne, depuis des années, avec mon appareil-photos. J’ai quelques centaines de photos (si pas plus) de fleurs, de fruits, de graminées récoltées durant les 4 saisons. Je les partage sur mon blog ou sur FB (lorsque je suis certaine de leur nom. Mais, vous vous doutez bien qu’avec la majorité je « bats le beurre » … Bon, j’ai quelques bouquins qui me viennent en aide … C’est pas évident pourtant. Pourriez-vous me conseiller un ouvrage de référence sur le sujet qui pourrait m’aider ? J’ai en ma possession le guide des fleurs sauvages de delachaux et niestlé ainsi que « 450 fleurs (même édition) et les fleurs sauvages de Michael Lohmann… Un grand merci et bravo pour votre blog.

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