La Gazette des Plantes s’est baladée dans la forêt de Soignes, et y a fait quelques découvertes intéressantes : la Laîche à épis pendants, l’Oxalis petite oseille et l’Adoxe ou Moscatelline. Prenez votre bâton de marche et allons-y!

Laîche à épis pendants

Oxalis petite oseille

Adoxe ou Moscatelline
La Forêt de Soignes
La Forêt de Soignes est un massif forestier d’un peu plus de 4.000 hectares situé au sud-est de Bruxelles. Elle n’est pas très diversifiée car elle est composée pour plus de 80% de hêtres. En outre, elle est aussi très fragmentée par le réseau routier. Malgré cela, le botaniste amateur peut y découvrir quelques plantes intéressantes, surtout au printemps avant que le feuillage du hêtre n’obscurcisse le sous-bois.
Pour cette promenade, nous avons remonté le vallon très encaissé du Vuylbeek, un ruisseau forestier qui traverse des zones marécageuses et des prairies humides. Contrairement à ce que son nom pourrait laisser supposer (vuil signifie sale en néerlandais), ses eaux sont très propres.
La Laîche à épis pendants (Carex pendula)
Deux étangs occupent la partie située en aval du vallon : le Petit Etang et l’Etang de l’Ermite. Leurs abords abritent une riche végétation aquatique.
C’est sur la rive du Vuylbeek, juste en amont du Petit Etang, que poussent actuellement plusieurs touffes de la Laîche à épis pendants, appelée aussi Laîche pendante (Carex pendula).
Les laîches sont des plantes herbacées qui poussent dans les lieux humides, en formant souvent des touffes. Leurs fleurs sont groupées en épis comme les graminées. On dénombre 60 espèces de laîches en Belgique, et il n’est pas aisé de les identifier!
La Laîche à épis pendants est l’une des plus faciles à reconnaître, justement en raison de ses épis qui retombent.
On peut la confondre avec la Laîche des bois (Carex sylvatica), mais celle-ci est plus petite : 60 cm de haut, contre 150 à 200 pour la Laîche pendante, et ses feuilles sont nettement plus étroites : de 3 à 6 mm de large, contre 12 à 20 mm pour la Laîche à épis pendants.
Les feuilles des Laîches sont allongées, quasiment linéaires, et leurs nervures sont parallèles. C’est une caractéristique des Monocotylédones, comme les graminées, ou l’Ail des ours par exemple.
Les Laîches constituent la famille des Cypéracées. Leur tiges ont généralement une section triangulaire, ce qui permet de les distinguer facilement des Poacées (les graminées, dont la tige est ronde et creuse), et des Joncs (tige ronde et pleine).
Angiospermes > Monocotylédones > Cypéracées > Carex
La Laîche pendante pousse dans des endroits très humides, sur des sols argileux et très riches en matières organiques (des sols appelés anmoor en pédologie). Elle est donc assez commune sur les rives des ruisseaux forestiers.
En été, on pourra peut-être voir dans ces mêmes endroits la Balsamine des bois (Impatiens noli-tangere).
Les épis de couleur jaune claire sont unisexués. Les épis qui retombent regroupent les fleurs femelles. Les épis mâles sont dressés.
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L’Oxalis petite oseille (Oxalis acetosella)
Avez-vous remarqué que plusieurs espèces de plantes aux fleurs blanches dominent les sous-bois au printemps? Il y a bien sûr l’Anémone des bois, l’Ail des ours ou bien l’Alliaire.

Alliaire
En voici une quatrième, l’Oxalis petite oseille, très commune en forêt de Soignes, et très facile à identifier!
Voyons tout d’abord la fleur : elle est solitaire en haut de son pédoncule, et exhibe 5 pétales blancs veinés de violet.

Fleur
De loin, ses feuilles ressemblent à celles d’un trèfle : elles ont 3 folioles en forme de cœurs renversés. Mais les trèfles préfèrent la pleine lumière, tandis que l’Oxalis est une espèce forestière.
L’Oxalis petite oseille vit en effet dans des lieux ombragés et humides, et montre une petite préférence pour des sols légèrement acides.
Elle fait partie de la famille des Oxalidacées, dont les membres vivent surtout sous les Tropiques.
Angiospermes > Dicotylédones > Oxalidacées > Oxalis
On ne trouve que 2 Oxalidacées indigènes en Europe : acetosella dans les forêts et corniculata (l’Oxalide corniculée), que l’on rencontre très souvent en ville, sur les trottoirs (voir photo à droite).
Si vous cliquez sur la photo à droite pour l’agrandir, vous remarquerez que les feuilles de l’Oxalide corniculée sont aussi trifoliées, et ressemblent énormément à celles de l’Oxalis petite oseille.
Les feuilles des Oxalidacées se replient lorsqu’il n’y a pas assez de lumière. Cette propriété s’appelle la nyctinastie.
Les feuilles ont un petit goût citronné. Oxalis vient d’ailleurs du grec oxys qui signifie acide. Et en français, on l’appelle fréquemment surelle.
On peut donc l’ajouter dans les mayonnaises ou les vinaigrettes, ou bien dans les potages ou les omelettes. Autrefois les bergers les suçaient pour se désaltérer.
En petite quantité, elles sont dépuratives et diurétiques.
Attention cependant : comme elles sont riches en acide oxalique et oxalate de potassium, il faut les consommer avec modération car elles peuvent provoquer des troubles digestifs et rénaux.
François Couplan (1) précise que 4 g d’acide oxalique sont nocifs, et 10 g mortels.
Pas de panique cependant : 100 g de feuilles d’Oxalis n’en contiennent qu’1 g!
En tout cas, elles sont déconseillées aux personnes souffrant de rhumatismes.
Petite note en passant : les oseilles ou patiences (le genre Rumex de la famille des Polygonacées) renferment aussi des concentrations importantes d’ acide oxalique.
(1) : Couplan François, Le régal végétal, Editions Sang de la Terre, Paris, 2015
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Adoxe ou Moscatelline (Adoxa moschatellina)
Si vous passez sans la voir, on ne pourra pas vous en blâmer. Elle ne se fait guère remarquer : elle est basse (20 cm de haut au maximum) et ses petites fleurs verdâtres ne sautent pas aux yeux!
D’ailleurs, son nom en témoigne; il dérive du grec ancien : le a privatif et doxa, la gloire. Adoxe signifie donc sans gloire.
En se penchant (décidément la pratique de la botanique n’est pas bonne pour le dos!) on s’aperçoit cependant que son inflorescence est assez spéciale.
En effet, 4 à 6 fleurs sont groupées au sommet de la tige florale (le pédoncule) en formant une sorte de cube.
Elles sont sessiles : elles ne sont pas portées par un pédicelle, chaque fleur reposant directement sur le sommet du pédoncule.
Elles dégagent un parfum musqué, ce qui est à l’origine de l’autre nom vernaculaire de la plante : la Moscatelline.
La floraison a lieu de mars à mai.
Une autre particularité de cette plante est qu’elle dispose de 2 types de fleurs. Les fleurs latérales possèdent 5 pétales, mais celle située au sommet du cube n’en a que 4.
Et ce n’est pas tout. En examinant la photo ci-dessous vous pourriez penser que la fleur est pourvue de 10 étamines (les organes mâles). En réalité, il n’y en a que 5 (ou 4 pour la fleur sommitale) : chaque étamine est en effet scindée en 2 branches. Chaque branche porte une loge de l’anthère renfermant le pollen.
Au centre, entouré par le cercle des étamines, se trouve le pistil (organe femelle) composé de 5 carpelles (ou 4 pour la fleur du haut).
La tige porte une paire de feuilles opposées.
Chaque feuille possède un court pétiole et est trifoliée. Les folioles sont divisées en plusieurs lobes qui se terminent par une courte pointe blanchâtre : on dit qu’ils sont mucronés.
Notez que toutes les parties aériennes de la plante disparaîtront en juin; seuls ses rhizomes subsisteront dans le sol.
L’Adoxe préfère les lieux frais et ombragés, et les sols riches en minéraux et plus particulièrement en azote.
Même si elle passe inaperçue, elle est courante dans les sous-bois, là où poussent également la Ficaire et l’Ail des ours, et aussi la Primevère élevée.

La Primevère élevée
L’Adoxe fait partie de la famille des Adoxacées.
Angiospermes > Dicotylédones > Adoxacées > Adoxa
Aussi surprenant que cela paraisse, c’est donc une cousine des sureaux et des viornes!
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